Presque 3 ans jour pour jour que ce scandale sanitaire sans précèdent a éclaté ... Où en sommes nous ?
Je voudrais tout d'abord faire une mise au point.
Depuis le début, les médias, les citoyens stigmatisent les Victimes ... parce qu'il s'agit de prothèses mammaires !
La chirurgie esthétique reste un tabou dans notre pays, les mentalités ont beaucoup de mal à évoluer malheureusement.
Cependant, cette fraude ne doit pas être un prétexte pour masquer les vrais problèmes.
Oui, 80% des Victimes ont eu recours à une intervention de chirurgie esthétique et 20% à une intervention de chirurgie réparatrice après cancer ou malformations.
Les citoyens bien pensants culpabilisent les premières et déplorent ce drame pour les secondes ... mais il n'y a qu'une seule catégorie de Victimes.
Elles sont TOUTES Victimes d'un individu malfaisant, Jean Claude Mas, qui pour se faire de l'argent, a fraudé et introduit dans les prothèses que son entreprise fabriquait, de la silicone industrielle impropre a être implantée dans un corps humain.
Elles sont TOUTES Victimes des organismes de contrôles et de certification qui se sont laissés berner par cet individu et tout le personnel de cette entreprise pendant plus de 10 ans.
Ce que tous ces bons citoyens oublient ou refusent d'admettre, c'est que cette fraude aurait pu et peut encore se produire sur n'importe quel autre dispositif médical implantable, prothèse de genou, de hanche, pacemaker, pompe à insuline ... Des milliers de dispositifs médicaux implantables sont certifiés et mis sur le marché selon les mêmes procédures que les prothèses mammaires.
Alors cessons de faire le procès des Victimes, mais condamnons les vrais coupables et corrigeons les failles du système qui ont permis que cette fraude puisse avoir lieu.
Un rapport d'une commission sénatoriale a pointé les problèmes et proposé des solutions ... rien n'a changé pour le moment ! (ici)
Un procès hors norme va s'ouvrir le 17 avril prochain à Marseille.
De nombreux journalistes mettent un point d’honneur à " faire un sujet " sur l’affaire avant ce procès.
Les questions sont toujours les mêmes … Quel est votre état d’esprit ? Que pensez-vous de ce procès ? Qu'en attendez-vous ? …
Et bien, je suis encore très en colère, toujours aussi combative … d’autant plus que rien, de ce qui a permis que cette fraude puisse avoir lieu, n’a changé !
L’issue de ce procès est quasiment connue, les prévenus sont coupables, les preuves sont là et ils ont reconnus les faits … seulement, toute la chaîne de responsabilité ne sera pas étudiée et tous les responsables ne seront pas sur le banc des accusés.
Certes Monsieur Mas et son équipe ont fraudé, mais tous les employés savaient … pourquoi seulement ces 5 là ?
En effet, 120 personnes savaient et cachaient tout à chaque visite du certificateur.
La "société PIP (Poly Implant Prothèse)" en tant que "personne morale" n’est pas citée, ce qui interdit l’accès au liquidateur et aux assureurs pour les victimes.
TÜV Rheinland, qui a certifié ces prothèses pendant ces 10 années, est sur le banc des victimes … un comble ! Il a été trompé et ne s’en est même pas rendu compte … Il se prétend certificateur et s’octroie le droit de donner des certifications ! Il y a vraiment de quoi se poser des questions sur sa capacité à attester que des produits sont bons à être mis sur le marché en toute confiance.
Il avait la possibilité d’organiser des contrôles inopinés, de prélever des échantillons … Il ne l’a pas fait, manque de curiosité ? Juste le minimum légal …
Brentag, qui a fourni des quantités très importantes d'huile de silicone industrielle, impropre à être introduite dans un corps humain, à un fabricant de prothèses mammaires remplies de silicone, sans se poser de questions.
L’ANSM, ancienne AFFSAPS, n’est pas citée non plus, alors qu’elle n’a pas réagit aux alertes.
Comme dans l’affaire du médiator, elle n’a pas écouté, n’a pas réagit aux alertes en France ni à celles de l’étranger.
Les chirurgiens n’ont pas tous déclaré les problèmes qu’ils rencontraient avec ces prothèses aux autorités sanitaires … ce qui à encore ralenti le processus d’alerte.
Ils se sont juste contentés pour certains de signaler les ruptures à PIP de façon à obtenir des prothèses en garantie.
Donc, ce procès, organisé avec de très gros moyens, va coûter très cher aux contribuables que nous sommes, sans que les vrais problèmes ne soient évoqués et sans qu’aucune mesure ne soit prise pour qu’un tel scandale ne puisse plus se reproduire.
Le parc Channot à Marseille loué pour un mois, les victimes qui se déplaceront seront indemnisées, déplacements, hébergements, repas, pertes de salaires... Des estimations évaluent à 800 000 € le coût de ce procès, tout sera réglé par la chancellerie sans compter les éventuelles indemnisations !
Mon combat :
- Prise en charge de façon équitable de TOUTES les Victimes de cette fraude.
Le sujet n’est pas de faire le procès de la chirurgie esthétique, cette fraude aurait pu toucher n’importe quel autre dispositif médical implantable … prothèse de genou, de hanche, pacemaker, pompe à insuline …
- Instaurer un vrai suivi médical au long cours des victimes de cette fraude.
Aujourd’hui, personne n’est capable de nous dire ce que nous risquons à moyen ou long terme… cette silicone industrielle n’ayant jamais été testée pour une implantation dans un corps humain. Si une pathologie apparaît dans l’avenir, sans qu’un suivi de "cohorte" ne soit mis en place, rien ne pourra être attribué à ce produit et aucun recours ne sera possible.
- Création d’un fichier pour tous les dispositifs médicaux implantables, afin de pouvoir prévenir tout porteur rapidement en cas de défaillance.
30 000 femmes potentiellement porteuses de ces prothèses selon les autorités sanitaires, mais seulement 5 127 plaintes et 14 327 femmes explantées fin octobre 2012… Où sont les autres femmes ? Y a-t-il vraiment 30 000 porteuses ?
Aucun moyen de les identifier ni de les prévenir.
- Revoir les procédures de mise sur le marché de ces dispositifs médicaux implantables ainsi que les certifications.
Instaurer une traçabilité de la fabrication à l’implantation.
- Rappeler l’obligation de déclaration de matériovigilance en cas de problème afin que les autorités puissent réagir rapidement.
- Pouvoir déposer une plainte collective au nom d’association de victimes.
Ceci éviterait la multiplication de plaintes individuelles, la création de plusieurs associations défendant le même type de victimes et surtout simplifierait les démarches judiciaires et allégerait le travail des tribunaux… un problème, un interlocuteur et une seule affaire.
Hier, une nouvelle injustice a été révélée, la juge d'instruction Anaïck Le Goff en charge du dossier pour "blessures involontaires" trie les Victimes.
Elle écarte écarte du futur procès pour "blessures involontaires", dont la date n'est pas encore fixée, toutes les femmes qui se sont faites enlever ces prothèses frauduleuses sans que ces dernières ne soient rompues. (ici)
Pour elle, ces femmes ne sont pas Victimes puisqu'elles n'ont pas de séquelles !
Or, la définition d'une blessure en terme juridique est la suivante "atteintes volontaires ou involontaires à l'intégrité physique de la personne", crime ou délit puni selon les conséquences corporelles, la durée de l'incapacité totale de travail (I.T.T.), la qualité de la victime (mineur de moins de 15 ans, personne vulnérable, magistrat, etc.). [Le nouveau Code pénal sanctionne plus sévèrement les coups et blessures involontaires causés par un manquement délibéré à une obligation de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou les règlements.]"
Si une intervention chirurgicale n'est pas une atteinte à l'intégrité de la personne, je ne sais plus de quoi nous parlons !
De plus, il ne faut pas oublier les blessures morales de ces femmes.
Elles ont appris qu'elles avaient dans leur corps des produits destinés à l'industrie, impropres à être mis dans un corps humain, personne n'en connaît les conséquences à moyen ou long terme. (ici)
Le ministre de la santé, les autorités sanitaires et les chirurgiens ont recommandé à ces femmes de se faire explanter ces prothèses, les imageries médicales étant incapables de déceler une éventuelle rupture. (ici)
Par peur ou par précaution, elles se sont faites opérer.
Certes, elles ont eu la "chance" contrairement à d'autres, que leurs prothèses ne soient pas rompues, mais imaginez un seul instant leurs inquiétudes et leurs angoisses. De plus, rien ne prouve que du gel n'est pas passé à travers la membrane de la prothèse.
Elles n'en restent pas moins Victimes et ont droit comme toutes les autres à une justice équitable.
Les avocats ont fait appel de cette décision, tout va se jouer le 4 avril prochain, devant la chambre de l'instruction de la cour d'appel d'Aix-en-Provence.
Espérons que cette ordonnance d'irrecevabilité ne sera pas confirmée.
Article écrit par Victime de prothèses PIP